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CGU de WeTransfer : une mobilisation salutaire... jusqu'à quand ?
Le 15 juillet 2025, une vague d’indignation a saisi des millions d’utilisateurs après la découverte d’une modification majeure des conditions générales d’utilisation (CGU) du service de transfert de fichiers WeTransfer, dont la version mise à jour doit entrer en vigueur le 8 août 2025.
Au cœur du scandale : la nouvelle clause 6.3, qui stipulait noir sur blanc que les utilisateurs accordaient à WeTransfer « une licence mondiale, non exclusive, transférable, sous-licenciable et gratuite pour utiliser, copier, modifier, distribuer et créer des œuvres dérivées de [leurs] contenus — y compris dans le cadre de l’entraînement et du développement de modèles d’apprentissage automatique ».
Autrement dit, le but était pour WeTransfer d’entraîner son intelligence artificielle avec VOS contenus. Sans rémunération, sans notification préalable, et pour une durée illimitée.
Une telle clause pose d’évidentes questions juridiques, éthiques et professionnelles, en particulier pour les métiers de la création visuelle — photographes, illustrateurs, graphistes — qui utilisent cette plateforme pour transmettre des projets, commandes ou archives contenant des données confidentielles, des œuvres originales ou des informations sensibles.
Une mobilisation éclair qui a fait plier WeTransfer… sur la forme
Relayée massivement sur les réseaux sociaux, l’information a déclenché un tollé.
Sous pression, WeTransfer a réagi en urgence, modifiant la formulation de la clause litigieuse dès le lendemain. Dans sa déclaration officielle, la plateforme affirme : « WeTransfer n’utilise pas les fichiers transférés par ses utilisateurs pour entraîner des modèles d’intelligence artificielle. L’IA est uniquement utilisée dans des cas très limités, comme la détection de contenus illicites ou indésirables, afin d’assurer la sécurité et l’intégrité du service. »
Cependant, ce rétropédalage n’a convaincu qu’à moitié. Car si la mention explicite de l’intelligence artificielle a disparu de la clause 6.3, l’ambition demeure limpide. La version corrigée continue d’autoriser l’usage des fichiers pour l’« amélioration du service », sans davantage de précisions, laissant la porte ouverte à des usages automatisés, y compris l’entraînement algorithmique dans un cadre plus discret.
En clair : le risque demeure réel à partir du 8 août 2025. Le contenu de vos fichiers — y compris œuvres originales, documents de commande ou données personnelles — pourra être exploité sans encadrement, sans notification, et sans compensation.
Confidentialité, IA, CGU : les métiers de l’image en première ligne
Si l’entraînement des modèles est devenu une étape incontournable du développement numérique, doit-il s’effectuer sur les contenus créés par d’autres, sans consentement explicite, ni rétribution, ni transparence ?
Pour l'UPP, la réponse est claire : non. C’est pourquoi l’Union des Photographes Professionnels salue la mobilisation collective qui a permis d’obtenir une première victoire dans cette affaire. Mais elle rappelle également que la vigilance reste de mise.
Des alternatives existent
Vous vous interrogez sur la poursuite de l’usage de WeTransfer ? Voici quelques alternatives, plus respectueuses de la confidentialité des données :
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SwissTransfer : hébergé en Suisse, soumis à des lois strictes de protection des données. Aucune exploitation commerciale des fichiers.
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SMASH : service français, sans limite de taille, axé sur la confidentialité et la simplicité d’usage.
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Proton Drive : solution cloud sécurisée, chiffrée de bout en bout.
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Chiffrement local : pour tout transfert sensible, utilisez des outils comme PicoCrypt ou Cryptomator pour chiffrer vos fichiers avant envoi.
Cette affaire montre à quel point les droits d’auteur, la confidentialité des œuvres, et la souveraineté sur les données sont aujourd’hui menacés par des pratiques contractuelles opaques ou abusives.
L’UPP reste pleinement mobilisée pour surveiller l’évolution des CGU des plateformes, alerter les pouvoirs publics, accompagner les auteurs et défendre collectivement les intérêts des professionnels de l’image face à l’intelligence artificielle et aux logiques prédatrices de certaines entreprises technologiques.
Stéphanie de Roquefeuil
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